Les personnes en séjour illégal travaillent dur, mais au profit d’employeurs véreux
Il faut se défaire de l’idée selon laquelle les personnes en séjour illégal (les sans-papier, comme on les appelle usuellement) viennent chez nous pour profiter de notre prospérité. Bien au contraire, elles travaillent dur. Les employeurs malhonnêtes profiteront d’elle tant qu’elles n’obtiennent pas de permis de travail (temporaire). Maintenir le système actuel n’est pas une option.
Mais nous travaillons, madame
Lors de ma visite aux personnes en séjour illégal à la VUB et à l’église du Béguinage, j’ai souvent entendu la même chose : « Mais nous travaillons, madame ! Nous payons tous un loyer et avons un travail. » Ils sont nombreux à travailler depuis 5, 10 voire 15 ans dans notre pays. Mais en raison de leur statut, les personnes en séjour illégal n’ont que peu de droits. Il n’en va pas de même pour les employeurs.
Employeurs honnête et exploiteurs
Certains employeurs ne demandent qu’à engager ces personnes en séjour illégal. Il n’existe cependant pas de manière légale de le faire. L’expiration d’un visa ou une réponse négative à une demande d’asile obligent l’employeur à licencier son employé, même s’il est tout à fait satisfait de son travail. Je pense ici à Suzan et à ses fils. Elle a été mise à la porte du Petit-Château avec ses trois jeunes garçons pendant l’hiver 2009. Elle disposait pourtant d’une autorisation de séjour pour raison médicale pour un de ses fils. Cela fait maintenant 12 ans que la famille vit en Belgique. Mais elle est encore en séjour illégal. Le fils aîné est actuellement en 3e année de son bachelier en droit. Le deuxième suit une formation de plombier. Il travaille en contrat d’apprentissage chez un plombier qui souhaiterait l’engager. Seulement, c’est impossible.
Il faut se défaire de l’idée selon laquelle les personnes en séjour illégal (les sans-papier, comme on les appelle usuellement) viennent chez nous pour profiter de notre prospérité. Bien au contraire, elles travaillent dur. Les employeurs malhonnêtes profiteront d’elle tant qu’elles n’obtiennent pas de permis de travail (temporaire). Maintenir le système actuel n’est pas une option.
Il y a un besoin de main-d'œuvre. Certains métiers connaissent une pénurie de travailleurs. Les employeurs se voient contraints de chercher de la main-d'œuvre à l’étranger. Car les Belges ne veulent pas travailler dans ces secteurs. Et les personnes disposant des diplômes et compétences nécessaires (présentes chez nous mais en séjour illégal) ne le peuvent pas. Cette situation est absurde.
Il faut aussi considérer qu’il existe des employeurs qui exploitent leur main-d'œuvre et la traitent comme des esclaves. Je pense ici à Ali. C’est complètement désemparé qu’il est venu me voir sur mon ancien lieu de travail. Il avait travaillé toute la semaine sur un chantier quelque part à Bruxelles, dans des conditions difficiles. Il allait recevoir 3 € de l’heure. Mais, le jour de la paie venu, il n’a rien reçu. Impossible de joindre l’employeur. Ali ne voulait pas aller à la police pour déposer plainte. C’est ainsi que certains profitent des personnes en séjour illégal. C’est la réalité dans notre ville. Détourner le regard ne fait que permettre aux employeurs malhonnêtes de continuer à sévir.
Permis de travail
Nous devons nous défaire de cette idée que les personnes en séjour illégal sont des profiteurs. Elles travaillent. Mais elles sont exploitées en raison de leur statut. Des permis de travail temporaires permettraient d’améliorer significativement la situation. En premier lieu, pour des raisons humanitaires. Mais également du point de vue économique. Nous avons besoin de ces personnes en séjour illégal et de leurs compétences.
Quiconque connaît la réalité bruxelloise sait à quel point la question est urgente. La question des permis de travail et de la protection des travailleurs en séjour illégal a été évoquée aujourd’hui en commission Économie. Le Ministre Clerfayt se rend bien compte de la quantité de travail réalisé par les personnes en séjour illégal et des abus. Mais la motivation pour prendre ce problème à bras-le-corps semble faire défaut au niveau fédéral et du Ministre Mahdi. Nous ne lâchons pas la pression.